Il existe encore dans l'intra-muros d'Avignon, largement bouleversé par l'urbanisme à chaque époque entre les 14e et 21e s., des empreintes touchantes de son passé médiéval et villageois. Surtout dans les antiques voies de circulation de la cité, dont certaines ont été miraculeusement épargnées par les architectes successivement pontificaux, mauristes et haussmanniens qui l'ont redessinée en leur temps.
La rue dans laquelle se situe la maison est de celles-ci. Modeste ruelle de desserte, elle longeait les jardins de quelques célèbres hôtels particuliers monumentaux, dont l'un figure aujourd'hui parmi les principaux musées de la ville. En son sein, où fut cultivé le basilic dès son importation des Indes au 15e s., expliquant qu'elle en porte encore innocemment le nom, il y a peu de façades car le nombre de maisons y atteint à peine la demi-douzaine. Seuls de grands murs de pierres en appareil irrégulier qui enclosent de vastes jardins privés exposent une histoire cadastrale quelquefois mouvementée, qui a conduit à l'existence de cette rue coudée.
C'est entre deux de ces hauts murs de pierre qu'apparait la petite maison aux contrevents bleu clair, élevée d'un étage sous combles aménagés. En réalité, il s'agit d'un logis à deux étages mais dont un seul est visible depuis la rue. Probablement écurie puis remise à véhicules hippomobiles, la maison se trouvait autrefois au fond du parc de l'imposant hôtel particulier, au mur de clôture duquel elle s'adossait avant que des indivisions passées n'en décident autrement. Elle fut sans doute construite à la fin du 19e s., à en croire la date de 1881, qui figure fièrement sur le chambranle ordinaire de sa porte d'entrée.
Bordant la calme rue, l'élévation en pierre présente un appareil régulier largement jointé, très caractéristique des maisons modestes provençales. La façade se montre si peu compliquée qu'elle pourrait être celle d'un dessin d'enfant : deux portes – une d'entrée, l'autre de garage –, deux fenêtres et une promesse de bonheur.

La maison

Les quatre ouvertures visibles depuis la rue sont ornées de chambranles en pierre calcaire taillée issue des carrières des Baux et faisant saillie sur le mur plus rustique, en appareil régulier de pierre des carrières du Gard.
Les deux baies du premier étage sont protégées par des contrevents en bois à deux battants. La porte charretière, dont subsistent les glissières extérieures en ferronnerie, est aujourd'hui une porte de garage coulissante en bois. À peine soupçonnables depuis la rue, deux autres ouvertures en longueur, qu'un avant-toit en bois recouvre partiellement, percent les combles à l'arrière d'un étroit balconnet filant.
La petite terrasse est de la taille d'une altana, cette terrasse vénitienne où les femmes venaient prendre le soleil en secret pour décolorer leur chevelure.

Le rez-de-chaussée
La porte d'entrée en bois ouvre sur un petit vestibule contenant une série de placards à portes coulissantes, également en bois, et une volée d'escalier en pierre, fort bien dessinée, sans garde-corps, à dallage de travertin antidérapant, conduisant à l'étage où il débouche, à la faveur d'une colonne transparente en verre.
Par ailleurs, à gauche, se trouve l'accès au garage par la porte intérieure ; et à droite, une buanderie-débarras, savamment aménagée grâce à une utilisation astucieuse de l'espace.

Le premier étage
Au débouché de l'escalier, fermé par une colonne de verre, une pièce à vivre aux murs alternant chaleureux appareil de pierres régulier et cloisons lisses peintes en blanc forme l'unique pièce du niveau, dans le prolongement de laquelle se tient une cuisine tout en longueur, entièrement équipée, avec puits de lumière. Les sols sont partout carrelés de travertin. Les fenêtres à double vitrage sont protégées par des contrevents en bois. Tel un dessin géant posé contre l'un des murs, un escalier flottant, sans contremarches, avec marches en teck et garde-corps en doubles fils d'acier verticaux, relie le premier étage au second.

Le deuxième étage
Gagnées sur les combles, deux chambres mansardées avec longues ouvertures latérales sur le balcon filant, sous l'avant-toit, côtoient une salle de bain, des toilettes et un couloir avec placards intégrés menant à la terrasse.
Les sols sont dallés de travertin et les murs en appareil régulier de pierres taillées des carrières des Baux. L'altana, close de murs et assurant à une extrémité l'entrée de lumière par le puits de jour dont profite la cuisine, est également carrelée.