Les manoirs-fermes fortifiées sont une signature originale du Bessin. Celui-ci témoigne d’un moment de prospérité où l’architecture était au service d’une ambition économique éclairée, nourrie par l’exploitation directe des sols. Bâti suivant le plan d'une forteresse médiévale, il se déploie selon une organisation défensive maîtrisée. Derrière un portail monumental à trois ouvertures, encadré de pilastres et couronné de pinacles fleuronnés, la propriété se révèle en un vaste ensemble organisé autour d’une cour presque fermée, d’un côté par les bâtiments, de l’autre par les douves en demi-cercle. Le manoir est établi en figure de proue, face au visiteur. En vis-à-vis, une charreterie semi-ouverte, gratifiée d'une série d’arches régulières, impose ses lignes équilibrées et robustes. L’ordonnancement rigoureux et les volumes puissants assurent un rare équilibre entre fonctionnalité et élégance. Attenante, une grange aux proportions exceptionnelles, modifiée au fil du temps, s’élève aujourd’hui à la hauteur d’une nef d’église, telle une cathédrale dédiée au travail des champs. À l’équerre de la charreterie, une autre grange en pierre ferme le côté nord de la cour. À l’ouest, se succèdent plusieurs bâtiments remarquables : une bâtisse en pierre abrite une presse encore munie de son mécanisme d’origine et une auge du 17e s. parfaitement conservée, une maisonnette de la même époque, parallèle au manoir, enfin, un bâtiment en pierre et brique du 19e s., qui atteste d’une occupation continue et d’adaptations successives. Le pavillon en pierre, qui évoque une tour de guet, constitue le second point focal de la cour. Sa toiture en fer de hache, qui passe du losange au rectangle, et sa façade percée de meurtrières, sont toutes deux classées au titre des Monuments Historiques. Les douves, partiellement comblées, enveloppent l’arrière et le flanc est du manoir. Elles renforcent le caractère défensif de l’ensemble.

Le manoir

Bâti en 1535, il constitue l’un des premiers exemples de la seconde Renaissance caennaise. Il est élevé de trois niveaux. Sa façade en pierre blonde laisse transparaître la noblesse de ses origines. Les toitures en ardoise, à forte pente, sont percées de lucarnes et de hautes souches de cheminée, qui accentuent la verticalité de l’ensemble. Le logis témoigne d’une volonté affirmée de monumentalité. La façade principale, asymétrique, révèle une liberté stylistique : les fenêtres sont traitées différemment de part et d’autre, la porte d’entrée est légèrement décentrée. Une tête sculptée, discrètement insérée dans un oculus, sous une lucarne encadrée de frontons sculptés, attire imperceptiblement le regard. À l’arrière, la façade plus sobre a été remaniée au 17e s.

Le rez-de-chaussée
Les volumes d’origine ont été adaptés au confort des occupants qui exploitent les terres. L'installation de cloisons a permis la création de cinq chambres à coucher fonctionnelles et de deux salles de bain. Ce niveau se compose également d'une salle à manger, d'une cuisine attenante mais distincte, ainsi que d'un espace nuit supplémentaire qui comprend deux chambres et une salle de bain. L'escalier central en pierre dessert les étages supérieurs.
Le premier niveau
Accessible via l'escalier central en pierre, il comprend une salle de réception demeurée intacte depuis des siècles. Selon les historiens, elle fut conçue à l’occasion d’un mariage et impressionne par sa hauteur sous plafond monumentale. Elle est gratifiée d'une spectaculaire cheminée de 3,70 m de haut, en pierre de Caen, moulurée et finement ouvragée. Son décor d’une grande richesse met en scène figures mythologiques, créatures hybrides et médaillons en losanges qui représentent aigles héraldiques, chevaux ailés, tritons et anges, autant d’éléments symboliques à contempler et interpréter. L’ensemble, par son originalité, son volume et la profusion des ornements, est protégé au titre des Monuments Historiques.
Une antichambre attenante mène vers une seconde aile, qui abrite deux autres chambres et leur salle de bain. Le salon donne accès à l’étage supérieur, sous combles, par un second escalier en pierre.
Le second niveau
Situé sous les combles, il est coiffé d'une charpente décorative. Une cheminée monumentale par ses dimensions, permet d'envisager l'aménagement de pièces de vie supplémentaires, probablement en usage aux 16e et 18e s.